L'après Panfilova

Nous laissons de côté l'alpinisme pour nous consacrer à la découverte du pays.

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Cimetière musulman au bord du lac.

Forts de cette première expérience d'alpinisme en indépendant et la tête pleine de belles images, nous nous enquérons d'autres glaciers relativement accessibles et décrits dans d'autres régions du Kirghizstan. Les topos en anglais ou français ne sont pas nombreux et les sommets à notre portée ancore moins. Deux options s'offrent alors à nous : les sommets dits d'acclimatation du Pic Lénine et la région de Karakol à l'Est du pays. Pour le Pic Lénine, nous avions renoncé au sommet faute de moyens pour l'équipement et d'expérience, mais les pics accessoires ne manquent pas. L'idée nous tente mais après moultes coups de téléphone, il faut nous rendre à l'évidence : la région est prise d'assaut par des agences russes qui moyennant de dormir et manger chez le copain et quelques backchishs peuvent éventuellement nous faire un devis oral... L'ambiance ne nous tente pas du tout et nous jettons notre dévolu sur Karakol. Fini les taxis escrocs et les marchrouchkas qui ne s'arrêtent pas : nous louons une voiture à bon prix grâce aux conseils de Slovaques rencontrés par hasard.

L'ambiance overlanding à Bichkek

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Les voyageurs faisant étape au Tunduk Hostel

J'en profite pour ouvrir une parenthèse sur l'overlanding (voyage motorisé par voie terrestre) ainsi que sur les longs voyages en général. Lors de notre séjour à Bichkek, nous avons eu l'occasion de côtoyer cet univers à la fois fascinant et questionnant. Nous avons ainsi partagé quelques jours avec des grands voyageurs comme Laura et Chris qui sillonent tout ce qui est sillonnable à moto depuis plus de 15 ans, vivant des livres qu'ils arrivent à publier en Allemagne. Tout ce qui peut être connu, ils en parlent avec passion : de l'hospitalité australienne, aux parcs nationaux d'Afrique du Sud en passant par le choc misère/abondance poussé à son paroxisme à Djibouti. En attente de visa pour poursuivre sur les routes de la Soie, nombreux sont les motards, les conducteurs de trucks, les autostoppeurs... Nous avons également fait la connaissance d'un jeune anglais venu avec son vélo soudé par ses soins depuis Bucarest. Plus étonnant encore nous avons assisté à des débats passionnés entre une bande de copains, professionnels de l'overlanding. Des trentenaires dont le métier est de conduire des groupes pendant des mois à bord de trucks vraiment impressionnants. La plupart étant des femmes, les annecdotes sur les douanes iraniennes ou des problèmes de moteurs face aux locaux masculins sont des plus amusantes !! Nous avons vécu quelques jours avec tout ce petit monde, partangeant projets, expériences, recommandations, grandes tablées festives... et c'est avec un pincement au coeur que nous avons quitté Bichkek.

Karakol

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Vestiges d'une station balnéaire soviétique.

A bord de notre petite citadine japonaise, nous partons donc vers Karakol à l'Est du Kirghizstan. La distance est courte mais la route est longue... L'autoroute annoncée s'avère être plutôt une piste à double sens, pas très rassurant mais on s'y fait vite. Après une heure, nous sommes arrêtés par un contrôle de police. Pas franchement aimable et surtout pas très honnète, nous y laisserons l'équivalent de 15 euros pour ne pas avoir allumé nos phares en plein jour ! Menacés d'aller au poste de police nous payons et partons sans demander notre reste -en allumant quand même les feux de position. Moins de 5 minutes plus tard : deuxième contrôle de police. Nos feux ne sont pas assez forts: 10 euros et confiscation de notre permis ! Cette fois c'en est trop ! Nous refusons et partons sans nous retourner... Sacré coup de pocker puisqu'il n'y a heureusement pas eu de suite ! La suite de la route est beaucoup plus détendue autour du gigantesque lac d'Issy-Kul (2e plus grand lac d'altitude après le lac Titicaca) dont les berges sont parsemées de cimetières musulmans et de vestiges des stations balnéaires de l'ex-URSS.

IIB or not IIB

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Le Glaude et La Denrée qui nous on gentiment pris dans leur jeep (UAZ) sur presque 10km.

Après avoir vainement essayé d'obtenir des informations tant sur les voies d'accès et la difficulté des glaciers que sur la possibilité d'avoir un guide ou une mule (ici on organise le trek et c'est tout. vous ne voulez pas faire du trek ??), nous partons vers le parc national dans lequel la carte annonce de très nombreux galciers. Sac au dos et chaussures de glacier aux pieds (pour porter moins de charge), nous débutons notre marche d'approche estimée à 3 jours. Mais jour après jour les mauvaises aventures s'accumulent : sentiers non balisés, tempête de grêle (encore !), alpinistes non enclins à partager leurs informations ou tout simplement très hautins, ampoules de plus en plus douloureuses... C'est après 3 jours d'efforts que nous arrivons au lac d'altitude d'Ala-Kul, point de départ d'un sommet annoncé comme IIB (plutôt facile dans la classification russe). Le paysage est superbe et nous profitons de cette soirée de répit pour échanger avec nos voisins de campement : un groupe de 7 porteurs (25 à 30kg de bagages et des traitements parfois à la limite de l'acceptable, brrref) dont 2 viennent de valider leur première année de médecine à Bichkek et rêvent de devenir chirugiens cardiaques... Le lendemain, enfin, nous arrivons à proximité du glacier... et il n'est pas du tout facile, ni accessible d'ailleurs ! Il nous reste des heures et des heures de marche à travers les éboulis et la voie sur glace paraît vraiment périlleuse. C'est là que recommence une tempête de grêle. Cette fois, c'en est trop : nous faisons demi tour et trouvons refuge auprès d'un couple franco-allemand entre 50 et 60 ans. Alpiniste chevronné, Fred nous rassure. Lui aussi a vu le galcier et des sommets alentours d'ailleurs, trop difficiles et dangeureux en l'absence de secours disponibles. Après un bon thé et des paroles réconfortantes nous rebroussons chemin. Sur la route du retour, nous profitons du très joli cadre du parc, devisons avec un jeune Israëlien dégouté par le service militaire et par l'échec de son pays, et finissons la route en stop dans une jeep UAZ conduite par deux vieux russes forts sympathiques ! Lavés et reposés, le bilan est devenu clair : nous arrêtons d'essayer de faire de l'alpinisme au Kirghizstan. L'Europe ne manque pas de glaciers et de sommets, accessibles et sécurisés. Le Mont Blanc n'a qu'à bien se tenir!

C'est donc serein que nous allons profiter des autres nombreuses ressources de ce magnifique pays : fête traditionnelle, artisanat, dégustation de produits à base de lait de jument, visite de caravanserail sur les routes de la soie... Voila le programme !


Kirghizstan